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  • Photo du rédacteurYokatsuki

Chapitre 6 : Un début

J’ouvre lentement, doucement les yeux. J’ai mal un peu partout… Mon bras me lance… Je suis dans une pièce toute blanche… Hôpital. Ca sent l’hôpital. Je regarde autour de moi, tente de me redresser et me retrouve en position assise sur mon lit blanc. C’est là que je me rends compte qu’il est assis à ma gauche, près de la fenêtre. Je me mords la lèvre inférieure, ouvre la bouche pour parler mais aucun son ne sort. Je n’arrive plus à bouger. Je… Pourquoi est-ce qu’il me regarde avec cet air de reproche… ? Pourquoi s’avance-t-il lentement vers moi avec cet air effrayant sur le visage… ?

Puis c’est le choc.


« -Idiote, tu n’aurais pas dû rentrer, avant-hier soir… dit Melyan en me prenant dans ses bras.

-… J’ai dormi tout ce temps ?

-C’est tout ce que tu trouves à dire ? s’exclame-t-il en s’écartant de moi pour me regarder dans les yeux. T’as failli tomber dans le coma !

-Mais… Je…

-Imbécile ! Idiote ! Inconsciente ! »


Le garçon crache ses paroles en baissant la tête, les yeux fermés. Une fois le silence revenu, je tente de dire quelque chose mais suis coupée dans mon élan par le regard du garçon qui croise le mien. Il pose sa main droite sur ma joue, l’air désolé, et je craque. Je me mets à pleurer. Je pleure toutes les larmes de mon corps, toute ma douleur, toute ma tristesse, toute ma souffrance. Je pleure à chaudes larmes en serrant le garçon que j’aime dans mes bras, ne voulant plus le lâcher. Il ne m’a pas abandonné, j’ai honte d’y avoir ne serait-ce que songé.

La porte s’ouvre brusquement et je me tourne pour voir qui vient me rendre visite. Un médecin accompagné d’une femme dont je reconnais la voix lorsqu’elle me dit bonjour. Madame Rivey. Je tente un sourire mais mon bras me lance et je fronce les sourcils tandis que Melyan me caresse lentement la tête.


« -Yokatsuki, comment vous sentez-vous ? demande le médecin.

-Bien. J’ai un peu mal au bras.

-C’est tout à fait normal. Vous avez dormi pendant un bon moment !

-Je suis en pleine forme, dis-je en tournant mon regard vers Mel pour lui sourire.

-Madame Rivey prendra soin de vous à partir d’aujourd’hui, et ce jusqu’à ce que votre mère soit déclarée non dangereuse envers vous.

-Et si jamais ils la mettent en prison ?

-Vous serez placée en famille d’accueil.

-Oh.

-Je vous laisse, une infirmière passera prendre de vos nouvelles, dit le médecin en sortant de la pièce. »


Et le silence se fait instantanément. Le regard de la mère de Mel me transperce, ce qui me fait froid dans le dos. Je n’ose pas bouger. Je continue de regarder mon petit ami dans les yeux pour me rassurer mais il finit lui-même par regarder sa chère et tendre mère pour m’inciter à en faire de même.


« -Yokatsuki Hanarimo Chiho Floody, jeune fille, je t’avais dit de venir directement chez nous !

-Il m’a appelée, j’étais obligée de le rejoindre…

-Franchement… Regarde-moi ton bras, ma belle, dit-elle d’une voix plus douce.

-T’as vu, elle a retenu ton nom complet, fait remarquer Melyan en passant sa main dans mon dos.

-Désolée…

-Mouais, c’est oublié. Bon, tu as entendu ? A partir d’aujourd’hui et ce jusqu’à ce que ta mère soit jugée, tu restes chez nous !

-Oui…

-Comme tu n’as aucune famille hormis tes parents, nous en avons pris la responsabilité. Après tout, c’est comme si tu faisais partie de la famille !

-Merci…

-A quoi tu penses ? demande Melyan en remarquant mon absence de réaction.

-… J’étais en train de me demander si ça en valait la peine.

-De quoi ?

-De vivre. »


Le brun me dévisage, choqué, et sa mère ouvre grand ses yeux. J’ai dit quelque chose de mal ? Il m’a demandé à quoi je pensais, alors j’ai juste dit ce à quoi je réflé… Oh mais qu’est-ce que ? Mais ? Mais ! Mais Yokatsuki t’es totalement débile ! Mais ! Tu viens de dire à ton petit ami et à sa mère que tu voulais mourir, bordel ! Mais ! Pourquoi tu parles à la deuxième personne du singulier comme si tu n’étais pas toi ? C’est une très bonne question, c’est parce que je suis débile, sûrement.

Cet idiot déteint sur moi. Je suis sûre qu’il parle comme ça dans sa tête tellement il est idiot.

Je sursaute lorsque Mel glisse sa main dans la mienne et entrelace nos doigts avant de s’assoir au bord du lit blanc dans lequel je suis installée. Il approche lentement son visage et dépose un doux baiser sur ma joue avant de venir murmurer à mon oreille.


« -Bien sûr que oui, ma belle. Rien que parce qu’à partir d’aujourd’hui tu vas découvrir ce que c’est que le vrai bonheur, tu dois rester en vie.

-… Tu as raison, murmurais-je en tournant légèrement la tête vers lui.

-Jusqu’à ce que le jugement de ta mère soit rendu, nous allons te montrer ce qu’est une maison dans laquelle on se sent en sécurité. Après ça, peu importe si tu vas en famille d’accueil ou non, ton foyer sera comme le notre. »


J’acquiesce et observe le visage de Melyan qui semble toujours inquiet. J’ai dû lui faire tellement peur… Entre ce qui m’est arrivé, le fait que je mette du temps à me réveiller et mes paroles il y a quelques minutes, je pense qu’il a frôlé plusieurs fois la crise cardiaque, le pauvre. Lorsque ses yeux se tournent pour m’observer, c’est un regard empli de tendresse qu’il m’offre. Je le lui rends du mieux que je le peux et essaie de sourire pour le rassurer, mais un bruit à la porte me fait sursauter. Quelqu’un vient de frapper.

Une jeune femme aux yeux particulièrement foncés et de courts cheveux noirs entre dans la chambre. Elle porte une tenue d’infirmière.


« -Bonjour, je vais vous demander de bien vouloir me laisser seule avec la patiente. Cela ne devrait pas durer longtemps.

-A tout à l’heure, Yokatsuki, dit la mère de Melyan en sortant. »


Mel dépose un rapide baiser sur mon front et s’éloigne avant de fermer la porte derrière lui. Un silence plutôt agréable s’installe dans la pièce et l’infirmière s’approche de moi. Elle prend une chaise et la pose à côté de mon lit puis s’assoit dessus, un sourire de façade aux lèvres. Sur son badge est marqué « Hana Kurch, infirmière ». Madame Kurch… Un peu comme le nom de famille d’un vieil ami à moi… Bref.

Elle a l’air très douce, très gentille… Son aura paraît agréable.


« -Enchantée, Yokatsuki. Je m’appelle Hana Kurch et je suis une infirmière spécialisée en psychologie.

-Psychologie ? Pourquoi ?

-Pourquoi je viens te voir ? Parce que tu remplis les critères de quelqu’un qui risque de devenir malade, que ce soit dans la dépression ou la folie.

-Génial.

-Oh, désolée, dit-elle en riant légèrement. Je vais le dire d’une autre manière. Tu as vécu avec ton père qui te frappait, et peut-être ta mère. Il est possible que, même inconsciemment, tu développes une haine envers les hommes ou les gens, ou bien que tu en aies peur. J’aimerais te poser quelques questions, donc.

-Faites donc.

-Comment te sens-tu dans une foule ?

-Oppressée. J’ai toujours détesté les foules.

-As-tu des difficultés à t’approcher physiquement des gens ?

-Non. Je suis timide, mais physiquement je n’ai pas de problème avec ça.

-Avec les hommes… ?

-Comme vous avez pu le constater, j’accepte d’être proche des garçons…

-Oh, oui, le brun. C’est ton petit ami ?

-C’est aussi une question… ?

-J’allais y venir, donc oui, répond-t-elle avec un sourire.

-Oui.

-Depuis longtemps ?

-La veille de… ça.

-Ça ?

-Hier…

-Oh, d’accord. C’est tout nouveau, alors.

-Oui, mais on se tournait autour depuis longtemps… La sixième, à vrai dire.

-Ah oui, quand même ! C’est un bel amour de jeunesse, dis-moi.

-Ha ha, oui.

-Et… C’est lui qui t’as sauvée, en quelques sortes ? demande madame Kurch.

-Oui.

-Ce n’est pas pour ça que tu l’ai…

-Non, la coupais-je. Je l’aimais depuis longtemps, je vous le dis. Ce qu’il s’est passé à resserré nos liens, bien sûr, mais ça ne fait pas tout. »


La jeune femme marque plusieurs choses sur une feuille qui repose sur une sorte de planche puis relève la tête vers moi, un air désolé au visage. Elle s’excuse, pensant m’avoir vexée, et je la rassure en m’excusant à mon tour de l’avoir coupée dans sa phrase. J’ai été un peu brusque. Le fait que l’on puisse douter de notre relation m’agace, même si elle n’est réelle que depuis deux jours. Oh, et qu’est-ce que j’ai envie de sortir avec lui, me promener à ses côtés…


« -Excuse-moi de poser cette question qui risque de te paraître bizarre, mais as-tu déjà éprouvé une certaine satisfaction lorsque ton père te maltraitait ?

-Non. Jamais je n’ai apprécié me faire frapper par… Lui.

-Ce n’est pas ton père ?

-Pas à mes yeux. Parfois j’espère même que ma mère ait été infidèle et que je sois l’enfant de quelqu’un d’autre que lui. Imaginer partager des gènes avec lui me dégoûte.

-Je vois. Encore une question embêtante, t’es-tu déjà infligé toi-même des blessures ?

-Non.

-Et penses-tu au suicide ?

-… J’y pensais, mais on m’a fait comprendre que je n’avais pas encore goûté au bonheur et que c’était maintenant que j’allais découvrir toute la beauté de la vie.

-La personne qui te l’a fait comprendre est très intelligente et sage.

-Je sais.

-C’est ton petit ami ?

-Oui, c’est Melyan.

-Tu as l’air de beaucoup tenir à lui, dit-elle d’un air suspicieux.

-Je l’aime. »


La jeune femme m’observe un moment puis se remet à écrire sur sa feuille. J’entends le stylo gratter, c’est un son assez agréable… Mais pas autant que celui d’un crayon à papier qui glisse sur une feuille. L’un des bruits les plus agréables à écouter que je connaisse. Puis le stylo arrête sa course et la jeune femme relève la tête avec son sourire de façade toujours présent. Lorsqu’elle me dit qu’elle a terminé et qu’elle va partir, je la retiens. J’ai envie de…


« -Est-ce que…

-Oui ? demande l’infirmière tandis que j’hésite.

-Hum…

-Tu veux parler ?

-J’aimerais bien.

-Je suis là pour ça, tu sais. De quoi veux-tu parler ?

-Je voulais… Je sais pas… Est-ce que vous donnez des consultations, ou vous n’êtes qu’infirmière spécialisée ?

-En fait, je ne fais que rendre service en venant travailler ici. J’ai un cabinet pas très loin de l’hôpital.

-Ce serait possible que je… Je pourrais prendre rendez-vous ?

-Bien sûr. Ce serait avec plaisir que je t’écouterai, Yokatsuki.

-Merci…

-Autre chose ?

-… Non, je crois que c’est bon.

-Très bien. Je te donne ma carte, appelle-moi quand tu veux pour que l’on se donne une date.

-Merci. »


Madame Kurch sort de la chambre et je me retrouve seule avec mes pensées. Parler me ferait du bien, je pense. Raconter… Tout raconter. Peut-être que je pourrais prendre un peu de recul sur tout ça, sur ma vie, et retrouver le sourire, qui sait ?

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